En matière de transparence et d’égalité salariale, de nombreux efforts restent à faire. Que dit la loi, et comment agir dans vos CCI pour faire respecter la règlementation ?

Des écarts persistants
En France, les écarts de salaires entre les hommes et les femmes a diminué d’un tiers depuis 1995. Pour autant, il reste élevé. Ainsi, dans son focus annuel sur les écarts de salaires, l’INSEE relève un certain nombre d’écarts dans le secteur privé en 2023. Ainsi, le salaire des femmes est inférieur de 3,8 % à celui des hommes, à temps de travail et poste comparables. D’un point de vue global, tous temps de travail et postes confondus, l’écart s’élève à 22,2% en défaveur des femmes. Ces écarts s’expliquent en partie par un moindre volume annuel de travail pour les femmes, mais également par la répartition genrée de certaines professions. Les femmes n’occupent pas les mêmes postes ni ne travaillent dans les mêmes secteurs que les hommes. Et surtout, elles n’accèdent moins aux postes les plus rémunérateurs.
Ce n’est pas forcément mieux dans le secteur public ! Toujours selon l’INSEE, à volume annuel de travail égal, le salaire net moyen de la fonction publique est inférieur de 3,7 % à celui du secteur privé. L’écart global de rémunération entre les femmes et les hommes est lui de 16%.
Dans le réseau des CCI, alors que les femmes représentent 67% de la population, l’écart entre femmes et hommes subsiste. Ainsi, à niveau de classification et en salaire de base équivalent, il varie entre 2,1% et 5,5% (selon le type de contrat – public ou privé – et la catégorie socio-professionnelle).
A travail égal, salaire égal… Les dispositifs existants
Tout employeur est tenu d’assurer, pour un même travail ou un travail de valeur égale, l’égalité de rémunération entre les femmes et les hommes. Ce principe interdit toute discrimination de salaire fondée sur le sexe. Cette disposition s’impose à tout type d’employeur et de salarié, autrement dit, tant les employeurs privés que le secteur public.
En outre, la législation française a déjà intégré certaines mesures pour suivre et résorber ces inégalités. On peut notamment citer l’index d’égalité professionnelle, mis en place pour toutes les entreprises de 50 salariés et plus. Par ailleurs, à compter du 1er mars 2026, les entreprises de 1000 salariés et plus devront atteindre au moins 30% de femmes et d’hommes cadres dirigeants ou membres d’instances dirigeantes.
Etat, collectivités territoriales et établissements de la fonction publique hospitalière sont également soumis à une obligation de transparence. Cela se traduit par une publication annuelle des dix plus hautes rémunérations versées, avec la répartition entre femmes et hommes.
A ces dispositions s’ajoutent des obligations de négociations sur l’égalité professionnelle. Ces négociations doivent normalement être annuelles.
Mais la loi n’impose pas aux employeurs de faire preuve de transparence en matière de salaires, du moins pour l’instant…
Les changements à venir
La directive européenne 2023/970, adoptée le 10 mai 2023, vis à renforcer le principe d’égalité salariale. Elle devra être transposée en droit français au plus tard le 7 juin 2026.
Elle prévoit notamment :
- Des grilles de salaires accessibles. Les entreprises de plus de 100 salariés devront publier leurs grilles de salaires et les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes. Cela implique pour elles l’obligation d’afficher les fourchettes salariales dans leurs offres d’emploi et l’interdiction de questionner les candidats sur leur historique de rémunération.
- Des critères transparents. Obligation sera faite aux employeurs de fournir à ses salariés des informations sur les critères utilisés pour définir les rémunérations et les évolutions de carrière. Les contrôles seront renforcés. Ainsi, les employeurs devront notamment fournir les éléments suivants :
- Ecart de rémunération entre les femmes et les hommes ;
- Ecart de rémunération entre les femmes et les hommes au niveau des composantes variables ou complémentaires ;
- Ecart de rémunération médian entre les femmes et les hommes ;
- Ecart de rémunération médian entre les femmes et les hommes pour les composantes variables ou complémentaires ;
- Proportion de travailleurs féminins et masculins bénéficiant de composantes variables ou complémentaires ;
- Proportion de travailleurs féminins et masculins dans chaque quartile ;
- Ecart de rémunération entre les femmes et les hommes par catégorie de travailleurs, ventilé par salaire ou traitement ordinaire de base et par composantes variables ou complémentaires.
- Par ailleurs, les salariés pourront demander :
- Les niveaux de rémunération pratiqués pour leur poste.
- Les critères utilisés pour décider des augmentations ou des promotions.
- La moyenne des salaires des collègues occupant un poste équivalent.
- Si un écart salarial de plus de 5 % est constaté entre deux salariés à poste égal, et qu’aucune justification objective ne peut être apportée, celui-ci devra être corrigé
- Discrimination salariale. Si un salarié estime être victime d’une discrimination salariale et s’appuie sur des faits présumant l’existence d’une telle discrimination, ce sera désormais à l’employeur de prouver l’absence de discrimination, directe ou indirecte.
- Des outils d’analyse dans les conventions collectives. La directive impose l’intégration, dans les conventions collectives et politiques de progressions salariales, d’une analyse détaillée des éléments variables (primes…).
A ces éléments s’ajoute l’obligation pour l’entreprise de plus de 250 salariés de fournir un rapport annuel détaillant les écarts de salaires. Le rapport précisera également les différents niveaux de rémunération (des moins qualifiés aux cadres dirigeants).
Les leviers pour garantir la transparence et l’égalité salariale
CSE et organisations syndicales ont accès à un certain nombre d’informations qui contribuent à promouvoir la transparence et l’égalité salariale. On peut ainsi citer :
- Les informations remises aux organisations syndicales pour la négociation sur les rémunérations et légalité professionnelle (dont les NAO).
- La base de données économiques, sociales et environnementales, à laquelle a accès le CSE.
- L’index d’égalité professionnelle
- La consultation annuelle sur la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi, avec l’analyse du bilan social.
A ces sources d’information, s’ajoutent également les affichages obligatoires (lutte contre la discrimination, égalité professionnelle…).
La transparence et l’égalité salariale dans les négociations à venir
A l’aube des négociations sur la classification et la politique de rémunérations, la CFDT-CCI exige que toutes les informations nécessaires soient transmises aux organisations syndicales. Cela commence par la fourniture d’une analyse de l’état des lieux plus poussée que celle fournie à ce jour.
En parallèle, les critères de classification qui vont être négociés devront être plus objectifs et plus clairs. Ils devront également être transparents et équitables.